L’objectif est ici de nous faire ressentir et comprendre le processus d'addiction et surtout, de formuler des propositions afin de faire évoluer notre regard et nos comportements.
Il sera question de l'addiction ou de la dépendance: une substance, une personne, un comportement, donc par rapport à quelque chose d’extérieur à soi.
Pour commencer, une histoire vécue : je vois une dame en consultation à l’hôpital ; elle vient de se faire opérer d’une tumeur. Lorsque je la rencontre, elle mentionne qu’elle fume plus d’un paquet par jour et des joints plusieurs fois par semaine. Au cours de notre entretien, je lui demande si elle a déjà pris des antidépresseurs, et là elle me répond : « ah non, certainement pas, je ne veux pas devenir dépendante ! » Cet exemple peut faire sourire, mais il prête plutôt à réfléchir …
1/ Qu’est-ce qu’une addiction ?
En médecine, c’est un besoin compulsif. On parle indifféremment de dépendance ou d’addiction (mot qui vient de l’anglais), de conduite addictive : comportement répétitif plus ou moins incoercible et nuisible pour la santé. Ici nous
Parlant de dépendance, il y a l’état, l’acte, le conditionnement qui conduit à la dépendance ou à l'addiction : « C’est plus fort que soi ».
Nous avons tous vécu dans notre entourage une situation en lien avec une dépendance ou une addiction. … Si on a un doute pour soi, c’est que peut-être il y a quelque chose, alors vous pouvez vous tester, comment ? En vous posant la question : que se passe t-il en moi si je dois me passer de … ?
Les exemples, fort nombreux, sont d’ordre physique et/ou mental.
Dépendances physiques : avoir besoin de manger plusieurs tablettes de chocolat d’affilée en rentrant chez soi ; boire de façon irrépressible ; ne pas pouvoir se passer de somnifères, de médicaments ; ne pas pouvoir s’empêcher de dépenser ; …
Dépendances mentales, sociales : avoir toujours besoin de l’avis de l’autre, se préoccuper à l’excès du regard, du jugement des autres ; ne pas pouvoir rester seul ; avoir besoin de séduire ou de contrôler les autres ; avoir besoin d’un guru ; ne pas pouvoir se passer de son mobile, de son ordinateur, de facebook ; être addict aux jeux d’argent, aux jeux vidéo ; ne pas pouvoir se passer de bosser ; …
Les expressions autour de l'addiction ou de la dépendance sont : je n’ai pas le choix - je ne peux pas m’empêcher de - c’est plus fort que moi - je ne peux pas faire autrement - je ressens de faire telle chose comme une nécessité…
2/ A partir de quand devient-on dépendant ou addict ?
C’est lorsqu’on agit contre ma volonté, pas lorsque c’est un objectif (comme le serait prendre du poids pour s’enlaidir).
A partir du moment où on perd de son libre arbitre, où on ne peut pas se passer des autres, où on met son « bonheur » à l’extérieur de soi. Concrètement, toutes les addictions semblent remplir le même rôle : calmer nos émotions.
Il y a deux niveaux d'addiction :
- physique : c’est lorsque l’organisme manifeste un syndrome de sevrage en l’absence de la substance : la consommation d’une substance peut s’accompagner d’une accoutumance qui nécessite d’augmenter les doses pour éprouver un même effet.
– mentale (psychologique, comportementale) : envie de consommer avec manifestation psychosomatique (bosser comme un fou conduit au surmenage).
Mécanisme : dans notre société judéo-chrétienne, on a beaucoup parlé d’absence de volonté … En fait il y a un dysfonctionnement du système de récompense qui est la conséquence des phénomènes de dépendance. Les addictions font augmenter la quantité de dopamine dans la zone du cerveau appelée circuit de récompense. C’est un circuit de plaisir qui participe au bien-être de l’individu. Les drogues quelles qu’elles soient sollicitent de façon forte ce circuit naturel et peuvent provoquer son déséquilibre permanent. Cependant les effets varient suivant les drogues et l’usage qu’on en fait.
On devient dépendant à partir du moment où nos processus de fonctionnement tant intimes que comportementaux sont affectés : généralement ce n’est pas le produit, la substance qui pose problème, mais la relation qu’on entretient avec une certaine substance, avec une personne.
3/ La dépendance est-elle un problème ?
Oui, non, pourquoi ? Ou est-ce un avantage, … ? C’est un problème à partir du moment où ça devient limitant pour le développement de sa vie, à partir du moment où on perd de son objectivité. Il y a la dépendance physique, physiologique : l’accoutumance, et la dépendance mentalisée : le déni, le mensonge, l’histoire qu’on s’est racontée.
Je vous propose de faire un exercice-test :
Suis-je devenu dépendant ou addict ? Et de quoi ?
Suis-je conscient de ma dépendance ?
Quelles en sont les conséquences négatives ? Le déni ? La mauvaise foi ? Nos relations à autrui altérées ? …
Quelles sont les conséquences positives ?
Quels sont les effets directement physiologiques ?
Les effets mentaux ?
Cette dépendance m’apporte-t-elle plus d’avantages que d’inconvénients ?
Il n’y a pas de recette : dans telle situation avec telle personne, c’est plus d’avantages que d’inconvénients, ou c’est l’inverse … D’où l’intérêt de faire l’analyse.
Remarque : la dépendance est plus accessible chez les autres que chez soi. On a une difficulté à être suffisamment lucide et réaliste avec soi : on minimise souvent l’impact de notre propre dépendance ou addiction. Le problème souvent est que derrière une addiction, il y a parfois un vraie obsession qui doit être traitée (lavage des mains, tocs..).
4/ A quoi est-on/devient-on dépendant ou addict ?
C’est relatif à chacun, au moment de la vie, la dépendance est intime, individuelle. Il n’y a pas de dépendance collective. Basiquement on est dépendant à quelque chose d’extérieur à soi c’est-à-dire que l’on met son investissement sur l’extérieur plutôt que sur soi. On s’accroche à cette croyance que la prise de cette substance nous fait du bien, calme notre angoisse, notre mal-être. C’est en fait le plus souvent un conditionnement familial, par imitation. « On ne le voit pas toujours venir », parce qu’il peut venir des fonds de tiroir de nos cultures.
La dépendance est souvent venue progressivement. On dit facilement : « Aujourd’hui, c’est comme ça, parce que ça me vient comme ça, spontanément », alors qu’il y a en amont tout un conditionnement.
5/ Comment comprendre cette dépendance ?
Les dépendances sont souvent encouragées par notre société de consommation, par les lobbys. Mais il s’agit de comprendre que c’est un processus qui a démarré en soi. En prendre conscience est un pas souvent important, mais cela ne suffit pas. Souvent nous avons laissé s’installer un certain mode de fonctionnement.
Dans l'addiction, nos sens sont en jeu : physique avec la cigarette, les drogues ; mentale avec la pornographie par ex ; dépendance mentale sociale, en croyant qu’on est incapable d’avoir un avis sur un sujet.
Nos dépendances ont beaucoup à voir avec les croyances. Certains disent qu’ils subissent, se sentent victimes de leur dépendance, alors que chacun en est à l’origine.
In fine la dépendance est une croyance, un déphasage vers le dedans, ce qui est différent de l’habitude qui est une action. La dépendance est une croyance égocentrée liée à une spécialité (dépendre d’un maître à penser, d’un guru,..). Elle s’apprend par mémorisation. Il y a dépendance dès que l’on ressent un besoin irrépressible. C’est le systématisme qui fait la dépendance.
On entend souvent : pourquoi on ne peut pas voyager sans chocolat avec soi, pourquoi on boit trop, pourquoi on fume, on ne s’explique pas.
Alors que souvent on ne cherche pas à comprendre : chacun porte en soi sa propre explication, sa propre motivation intime, le tout est de la faire émerger. C’est là l’intérêt que peut présenter un travail sur soi.
6/ Comment se libérer d’une dépendance … ?
C’est à voir au cas par cas. Chacun se rend dépendant ou addict dans une certaine dynamique de vie qui lui est propre. Sauf pathologie particulière, une dépendance n’est pas forcément une maladie, mais elle peut être invalidante, limitante pour sa vie. Il s’agit de se désaccoutumer dans le sens d’un mouvement à partir de soi. C’est-à-dire que l’’on va travailler sur soi plutôt que d’intervenir sur l’environnement, les autres.
Puisque nos sens sont impliqués dans nos dépendances, nous allons les utiliser car c’est not appui le plus sûr : travailler le sens concerné par la dépendance.
Donc, partir du problème, se mettre en oeuvre (déboucler la boucle dans laquelle on s’était enfermé) en sortant de la spécialité où l’on s’est installé. La dépendance est un fonctionnement de mise en œuvre spécialisée : il s’agit de redistribuer les cartes : passer d’une mono spécialité à autre chose.
Exemple : vous ne pouvez vous passer de joints : pourquoi ? Qu’est-ce que cela vous apporte ? De partir dans d’autres univers, d’éprouver de nouvelles sensations …
Ici, la mise en oeuvre va consister à se mettre au travail pour développer sa créativité sans fumer de joints. Alors, oui, c’est du travail, mais le résultat est beaucoup plus gratifiant, parce que cela vient de soi.
Comment se libérer ? On se libère progressivement en développant des intentions puissantes, en les réalisant, et en faisant un travail spécifique au niveau sensoriel. La clé du processus est de prendre une décision vraie d’arrêter, de la mettre en intention, puis de se mettre en action pour réaliser cette intention.
On ne peut pas se libérer d’une addiction malgré soi. Physiquement, on peut mettre des patchs, se faire poser un ballon intra-gastrique, prendre de la méthadone, faire du sport, il s’agit surtout de remettre nos sens au travail. Mentalement, on va développer des pensées positives, cesser de ruminer, de penser au passé,... Et dans notre imaginaire, nous allons devenir plus créatifs. C’est du travail.
Conclusion :
Lorsqu’on se vit dépendant ou addict, si l’on souhaite changer, c’est possible, à la hauteur de notre intention personnelle. C’est la mise en oeuvre de nos intentions qui est l’outil le plus puissant pour nous aider à nous libérer. Car seul le travail avec l’intention permet de se distancier de notre difficulté, et de travailler à sa résolution le plus efficacement. Pourquoi ? Parce que c’est un travail sur-mesure et qui englobe tous les aspects de notre personne. Sachant que l’on peut s’aider aussi très concrètement avec des béquilles, mais l’essentiel est de le faire en conscience et sur une période donnée.
https://www.psyparis-kapfer.fr